A part nous, tous les utilisateurs de l’ascenseur sont Chinois. Normal pour un immeuble de 48 étages situé au cœur de Shanghai ? Sans doute, sauf que celui-ci se trouve dans le quarier d’affaire de… Melbourne. Et si tout le monde, dans cet ascenseur, parle mandarin ou cantonais, il ne faut pas s’y méprendre, les mêmes parlent parfaitement l’anglais. Ils sont jeunes, talentueux, travailleurs et ambitieux. Ce sont les Australiens d’aujourd’hui et de demain. Ils sont la version contemporaine de l’immigration qui fut autrefois celle des bagnards priés de débarrasser le plancher de sa Majesté, d’aller purger leur peine aux antipodes et, si possible, de ne pas revenir.
Aujourd’hui, la donne a changé. On se bat pour venir s’installer en Australie et cette dernière ne dit pas non. Deux mille, c’est le nombre de nouveaux arrivants dans la seconde ville du pays chaque semaine. Oui, chaque semaine, Melbourne (moins de cinq millions d’habitants dont la moitié environ est née hors d'Australie) doit trouver le moyen de les loger et d’adapter ses infrastructures à cet afflux massif. Pas étonnant dès lors qu’on assiste à quelques étrangetés urbaines et architecturales. Il s’agit de densifier au maximum.
Densifier Melbourne pour loger 2000 nouveaux arrivants chaque semaine…
Bondi ou Bombay ?
L’intensification de l’immigration moderne date du début du siècle. Ils n’étaient que 80'000 par année au tournant du millénaire. Ils sont aujourd’hui largement plus de 200'000. Leur origine aussi a changé. Les Britanniques (non-bagnards) ont été pendant longtemps la principale source d’immigration (malgré le cancer de la peau qui menace leur épiderme pas vraiment adapté au soleil australien). Actuellement, les Indiens représentent près de 40% des nouveaux arrivants, suivis des Chinois, près de 25%. Le reste du monde se partage les restes.
Cette nouvelle démographie, qui assure le moteur de la croissance dans un pays de 25 millions d’habitants en panne de naissances, est en partie due à un changement des conditions d’acceptation opéré par les autorités australiennes. Il y a vingt ans, le regroupement familial était à l’origine de deux tiers de l’immigration. Seul un tiers était lié aux qualifications (skills) dont le pays et son économie avaient besoin. Aujourd’hui, cette proportion s’est inversée. En d’autres termes, on recrute volontiers les talents, mais seulement ceux dont on a besoin. Soit dit au passage, c’est exactement et dans les mêmes proportions la politique que le Président Trump essaie de faire admettre aux Etats-Unis.
… moyennant quelques étrangetés urbaines et architecturales
Des conditions très claires
Pour immigrer en Australie, il faut donc remplir certaines conditions : avoir moins de 45 ans et maîtriser l’anglais (à entendre certains Indiens, on se dit que l’examen est moins sévère qu’à l’époque de la White Australian Policy où il s’agissait à tout prix de défavoriser l’immigration non-européenne en faisant passer une dictée, le fameux Dictation Test. On se débarrassait ainsi des migrants maltais en leur faisant une dictée en… hollandais). Il faut aussi prouver sa bonne santé et de son « bon caractère », ce dernier concerne principalement le casier judiciaire : toute condamnation est rédhibitoire, l’acquittement aussi, s’il a été obtenu pour des raisons de déficience mentale (on n’est jamais assez prudent…). Mais le plus important, ce sont les qualifications professionnelles. Là, c’est très simple : soit on a un métier qui est sur la liste et on a de grandes chances d’être bienvenu, soit on n’est pas sur la liste et on est prié de renoncer ou de demander un visa temporaire pour deux ans.
Les ingénieurs d’abord
Si l’on est un inconditionnel des sciences humaines, il faut s’attendre à une grosse déception à la lecture de la liste. Disons que les Australiens font une différence très significative entre les hard et les soft skills. Les ingénieurs, quelle que soit leur spécialité, sont accueillis à bras ouverts (ce qui explique sans doute l’afflux massif des Indiens qui ont de remarquables instituts de technologie : les IIT). Les métiers de l’agriculture, les métiers techniques de la construction, de l’informatique, de la santé et de l’industrie sont également acceptés. Parmi les exceptions à ce tableau très « sciences exactes », quelques exotismes : danseur, chef (avec ou sans étoile), coach de tennis et… footballeur.
En revanche, si vous êtes hôtelier, musicien, broker financier, dessinateur de mode, pharmacien, psychothérapeute, agent d’assurances, prof de ski ou si vous exercez n’importe quel métier dans le domaine de la presse, vous êtes gentiment priés de passer votre chemin. Inutile d’aller voir en Nouvelle-Zélande : les deux pays ont un accord de libre-circulation et appliquent pratiquement les mêmes règles en matière d’immigration.
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